Pour une nouvelle politique migratoire européenne

Le 23 septembre 2020, la Commission européenne dévoilait son nouveau réglement sur la politique migratoire de l’Union européenne, quelques semaines après l’incendie survenu dans le camp de Moria en Grèce, qui avait réactivé les débats sur les différences de réglementations entre les pays européens. Alexandre Châtel, directeur du pôle Europe et géopolitique au Groupe socialiste universitaire (GSU), dresse un état des lieux de la situation et formule une série propositions pour renforcer le système d’asile européen, assurer des alternatives sûres d’arrivées sur le continent et défendre une insertion durable des personnes réfugiées et migrantes.

Une solidarité pragmatique, voilà l’innovation dont le nouveau « Pacte pour la migration et l’asile » a tenté de faire preuve.

La Commission européenne a présenté, le 23 septembre 2020, son nouveau règlement sur la politique migratoire de l’Union. Un équilibre entre « responsabilité et solidarité », c’est la promesse d’un mécanisme d’accueil nouveau sur le continent : abolition du règlement de Dublin, développement d’un mécanisme de solidarité pour les sauvetages en mer, renforcement des contrôles et durcissement des renvois… Le pacte présenté semble porter et défendre « beaucoup de fantasmes », mais « pour peu de changements ». 

Rappelons le contexte. La Commission a présenté ce plan attendu depuis plus d’un an sous la pression de l’incendie du camp de Moria survenu en Grèce le 9 septembre 2020. Les incendies ont en effet réanimé les tensions autour du dispositif de Dublin, jugé trop laxiste par les pays du groupe de Višegrad (Pologne, Hongrie, Slovaquie) et inégalitaire par les pays de première entrée (Grèce, Malte, Italie). La responsabilité du traitement des demandes d’asiles incombe à ces derniers – des pays où les délais d’examen peuvent aller jusqu’à dix-huit mois – créant de fait une forte concentration des personnes migrantes dans des camps saturés et insalubres.

Le nouveau pacte entend fonder une solidarité obligatoire à deux vitesses. D’une part, les pays qui sont prêts à accueillir davantage (Allemagne, France, Autriche, Irlande, Suède) se verront répartir les arrivées en cas d’afflux selon un mécanisme nouveau de « parrainage » basé sur le PIB et la démographie. Les examens des demandes d’asile pourront être conduits par d’autres pays que ceux de première entrée afin d’accélérer le processus. D’autre part, les pays traditionnellement opposés à l’accueil joueront leur part de solidarité dans l’organisation et le financement du retour des personnes déboutées. 

Le constat est clair. Le manque de solidarité entre les pays est à l’origine de la crise de la gestion migratoire, notamment depuis les afflux lourdement médiatisés de 2015. L’accueil des personnes exilées est une question épineuse en Europe, et souvent enlisée. Les enjeux de la migration oscillent entre la gestion d’un afflux jugé massif et la crainte d’une submersion alimentée par des groupes opposés à l’accueil. En somme, la migration est présentée comme étant un problème de société et les oppositions qui s’expriment dans le débat public se traduisent dans les incohérences et manquements des plans européens pour la migration. 

Les événements de 2015 sont révélateurs d’un profond paradoxe : « sept Français sur dix s’estiment mal informés sur la migration », alors qu’elle est un sujet de plus en plus médiatisé. Le traitement médiatique de la migration est en cause, et à raison. Depuis 2015, on observe une confiscation de la parole et l’idée d’une migration qui submerge prend de l’ampleur.

Or, l’Europe en général, et la France en premier, sont loin d’être submergées. En 2019, 130 000 demandes d’asile ont été recensées en France, soit 0,2% de la population. Pourtant, selon l’étude Fractures françaises réalisée par la Fondation Jean-Jaurès, Ipsos Sopra Steria, Le Monde et l’Institut Montaigne, 63% des Français pensent qu’il y a trop de personnes immigrées. et qu’elles ne feraient pas assez d’efforts pour s’insérer ; 42% se disent favorables à la fermeture des frontières. Les chiffres sont en effet à relativiser. Les arrivées en 2015 ont certes été trois fois plus importantes qu’en 2014 mais ne constituaient que 0,01% de la population européenne. Les chiffres sont ainsi le reflet d’un usage politique. Il y a des chiffres que l’on donne et d’autres non. On parle presque exclusivement des entrées mais jamais des sorties, alors que près de la moitié des arrivants quittent le pays d’accueil dans les cinq ans. 

C’est une question de cadrage du problème et de légitimation du phénomène. L’expression « crise migratoire » est incorrecte. Le pic d’arrivées de 2015 est avant tout le résultat de la guerre en Syrie et d’une réticence à l’accueil de la part de l’Union européenne (UE) qui s’est traduite par un durcissement des modalités d’accueil face à des migrations illégales qui augmentaient mécaniquement par cette même logique. 

Tout d’abord, rappelons l’importance des mots. L’une des grandes caractéristiques des événements de 2015 a été un mélange dans l’usage des termes. Réfugié·e, migrant·e, demandeur·e d’asile, exilé·e… Tous ces termes ne partagent pas la même signification et traduisent une réalité variable en droit international. 

Le terme « migrant·e » est un terme non défini dans le droit international et qui décrit toute personne quittant son lieu de résidence pour une autre région à l’intérieur de son pays ou dans un autre pays. La migration peut être temporaire, permanente, motivée par plusieurs raisons. Elle englobe les travailleurs migrants, les demandeurs d’asile et les étudiants internationaux.

Une personne « réfugié·e » est une personne qui a droit à une protection internationale au sens de la Convention de Genève de 1951. Signée par la France, elle établit que toute personne se trouvant hors du pays dont elle a la nationalité et qui craint, avec raison, d’y être persécutée du fait « de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques » est éligible au statut de protection de réfugié.

En 2015, « crise des réfugiés » et « crise des migrations » se mêlent et s’entremêlent. Pourtant, il est essentiel de réaffirmer une chose : la « crise migratoire » de 2015 n’est autre qu’une crise de l’accueil et de gestion des arrivées.  

Cependant, une chose est certaine, l’année 2015 a été à plusieurs égards exceptionnelle en Europe, avec plus d’un million de personnes migrantes qui ont tenté leur chance d’intégrer le continent à travers des passages dangereux, en quête de sécurité. Malgré les indicateurs, les pays membres se sont retrouvés non préparés et le système européen d’asile a été sévèrement mis à l’épreuve. Les réponses variées, mais notamment restrictives, ont renforcé les circonstances déjà précaires pour l’arrivée des migrant·e·s en Europe. 

Cette note formule ainsi une série de réflexions et de propositions pour renforcer le système d’asile européen, assurer des alternatives sûres d’arrivées sur le continent et défendre une insertion durable des personnes migrantes. Des propositions essentielles et fondées sur les principes de respect des droits fondamentaux, de la responsabilité et de la solidarité, que l’Union européenne se doit de défendre.

Les limites du « Pacte pour la migration et l’asile »

Quotas, répartition administrative, fourniture d’équipements et de moyens humains, regroupement familial élargi… : si plusieurs mesures ont en effet été défendues dans le but de rompre avec certains défauts du règlement de Dublin III, le nouveau Pacte laisse toutefois entrevoir de nombreux objectifs inachevés, peu innovants et dans la continuité des procédures existantes. 

Un renforcement des frontières

Après l’échec du pacte de Dublin qui a créé un afflux important dans les pays de première arrivée, ce nouveau règlement acte l’échec d’une politique de quotas de relocalisation après 2015. Son objectif était de renforcer l’effort commun à tous les pays de l’UE concernant la répartition, le traitement des demandes d’asile et la gestion des personnes déboutées. La volonté de surmonter les divisions se traduit par un nouveau mécanisme de parrainage en cas d’afflux : une répartition basée sur le PIB, la démographie et sur les efforts fournis les cinq dernières années. Ce système n’inclut pas les pays du groupe de Višegrad, souvent très opposés à tout type d’accueil : ils joueraient leur part de solidarité en finançant le retour des personnes déboutées.

Une responsabilité encore très externalisée

Le nouveau pacte se situe dans la continuité du règlement de Dublin III : l’État responsable de la demande d’asile est le premier dans lequel la personne est entrée dans l’UE. Ce n’est pas un pacte qui est pour la migration ; au contraire, il renforce les frontières, la prévention des arrivées et la coopération avec les pays tiers. En effet, il n’incite pas à la migration vers l’UE et continue de ne pas faire la distinction entre les personnes pouvant se réclamer du statut de « réfugié », et les personnes migrant pour des raisons économiques. De fait, le nouveau pacte renforce surtout le tri.

Un regroupement familial limité

Le dernier Pacte pour l’asile propose un regroupement familial encore très limité. De manière générale, il ne comprend pas toute la famille et exclut les parents – sauf dans le cas des mineur·e·s – les oncles, tantes et cousin·e·s. La notion de regroupement, supposément « élargie », a uniquement été étendue aux conjoint·e·s rencontré·e·s durant le transit. 

Une forte persistance des possibilités de renvoi

Le Pacte ne réduit pas les possibilités d’expulsion et de retour dans le pays d’origine : la durée des possibilités légales d’expulsion est la même, il n’y a pas de régularisation automatique des migrants ayant dépassé ce délai et il n’y a pas d’interdiction aux nations européennes de faire pression sur les pays d’origine pour la réadmission de leurs citoyens. De plus, si le nouveau mécanisme de solidarité pour les sauvetages en mer est censé passer par la fourniture d’équipements et de moyens humains, le pacte ne valorise toujours pas les ONG et ne rend toujours pas obligatoire l’admission sur le sol européen des personnes migrantes secourues en mer. Les États de l’UE apportent dans ce sens très peu d’appuis logistiques aux associations.

Pour un engagement solidaire et responsable

Un soutien aux opérations humanitaires

Une subvention portée par les États membres

L’Union européenne et ses États membres doivent allouer des fonds de manière forte et pluriannuelle basés sur des accords durables afin de reconnaître le travail fourni par les ONG et associations et ainsi soutenir les opérations humanitaires et la prise en charge d’insertion des personnes migrantes. 

Cette participation financière doit être obligatoire et fondée sur un pourcentage voté au préalable au niveau de l’UE. Ces fonds représenteront une part jugée juste des contributions des États membres au système européen d’asile, de migration et d’intégration. Ce pourcentage sera susceptible de varier pour prévenir de manière coordonnée des situations nécessitant un appui financier plus ou moins important. 

Sanctionner les manquements au devoir d’accueil

L’UE doit sévèrement sanctionner économiquement et politiquement les États membres en cas de refus et retards imposés aux navires humanitaires d’accoster sur le sol européen. Le droit international marin affirme l’obligation de venir en secours à toute personne en détresse. Il est primordial de se défaire de l’ambiguïté qui entoure, au-delà des sauvetages, l’arrivée au sol afin de travailler au mieux à la recherche d’une structure d’accueil sûre et adaptée. 

Il faut mettre en place des mécanismes prévisibles de débarquement et un amendement devrait être apporté au droit international et européen pour éviter toute marge d’interprétation : les États européens ont l’obligation d’assister les personnes sauvées en mer lorsqu’un appel leur est lancé. Ce fonctionnement, qui rend mécaniquement en première ligne des pays de première entrée comme la Grèce, l’Italie ou Malte, doit être financé par l’ensemble des États membres au travers de structures neuves d’accueil, d’enregistrement et d’hébergement en capacité de recevoir – temporairement – un large flux d’arrivées.

Assurer une arrivée saine et en sécurité

Une gestion régulée et complémentaire des chemins vers l’Europe

Depuis la déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants de 2016, de nombreux États ont reconnu qu’un investissement dans des passages sécurisés réduirait le risque encouru par ceux qui cherchent une protection. Un renforcement des programmes régionaux pour le développement permettrait d’accroître la solidarité entre les États membres de l’UE et de désengorger les pays de première entrée. Un tel sentier doit notamment se concentrer sur les principales routes vers l’Europe, soutenu par un appui militaire et marin afin d’assurer la sécurité des traversées dans les eaux continentales.  

Un regroupement familial élargi

Le regroupement familial est un droit fondamental. Souvent un motif de départ pour ceux qui cherchent à fuir leur pays, celle-ci doit être encouragée et défendue – le regroupement participe directement de la protection des personnes réfugiées et migrantes et de leur intégration dans la communauté. L’UE doit rendre ce droit applicable en :  

  • l’accordant à tous les entrants de manière inconditionnelle ;
  • élargissant le spectre inclus dans la famille au-delà des parents et des frères, aux oncles, tantes et cousin·e·s ; 
  • proposant une gestion commune de l’enregistrement et de la documentation ;
  • inscrivant la réunification familiale dans les conditions d’accès et de renouvellement d’un visa.

Créer des voies légales nouvelles pour les migrations

Le droit d’asile doit être sacré et protégé. Il doit être à la hauteur des principes humanistes et de liberté que l’UE défend. La porte d’entrée en France est aujourd’hui trop restrictive et fondée sur des critères trop étroits. Tous ceux qui ne relèvent pas d’un regroupement familial, d’une perspective d’études ou d’un projet économique basé sur une qualification personnelle – acquise au préalable – ont comme unique recours de demander l’asile. Cette situation renforce la tension sur le système d’asile, rallonge les délais d’attente pour ceux qui cherchent à obtenir un statut et finit par débouter des personnes qui ont pourtant des raisons fortes de rester sur le sol d’accueil mais qui ne relèvent pas nécessairement de l’asile.

L’instauration d’un refuge humanitaire et économique

Un refuge humanitaire doit être établi pour toutes les victimes qui, dans leur pays d’accueil, ou dans leur parcours migratoire, ont souffert des violences – viol, prostitution, contrebande, travail forcé. Toute personne doit avoir l’opportunité de jouir de ses droits les plus fondamentaux et l’UE doit en être la plus grande défenseuse. Il faut mettre un terme aux dangers qui entourent les parcours migratoires. Il faut apporter une alternative efficace aux personnes qui décident de venir en Europe et qui n’ont comme unique choix que de se tourner vers des passeurs. En 2020, plus de 2000 personnes migrantes sont décédées en mer.

Dans la suite de l’élargissement des critères de refuge, un refuge économique doit également être mis en place. L’extrême pauvreté est en effet un facteur important qui conduit des populations à quitter leur pays, en quête d’une vie meilleure, offrant de véritables opportunités économiques et professionnelles, sans distinction d’origine, de genre, de religion ou d’âge. La réussite économique et professionnelle des réfugiés est un pilier de leur insertion dans la société d’accueil et l’UE doit favoriser pleinement l’insertion à travers des programmes de formation auprès de tous les domaines professionnels. 

Reconnaître les réfugiés climatiques

On appelle réfugiés climatiques « l’ensemble des personnes qui doivent quitter leur maison ou quitter leur terre à cause de dégradations de leur environnement qui sont liées aux changements climatiques ». La Banque mondiale estime que les réfugiés environnementaux pourraient représenter jusqu’à 143 millions de personnes en 2050 rien qu’en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud et en Amérique latine. Les causes sont diverses : hausse du niveau des mers, dégradation des sols, catastrophes naturelles…Il faut cesser de parler des réfugiés climatiques comme une problématique lointaine – ces derniers sont une réalité déjà très présente. L’UE, en tant qu’institution internationale, doit faire pression pour que le refuge climatique soit inscrit dans le droit international de la convention de Genève.

Il est impossible de distinguer pleinement les enjeux environnementaux des enjeux sociaux et économiques. C’est pourquoi l’UE doit reconnaître les réfugiés climatiques dans son processus d’accueil.

Pour un système unifié d’asile

Une prise en charge soucieuse et accélérée

Faciliter la procédure de regroupement familial

Une des clefs pour fluidifier le système administratif de l’accueil est de simplifier le critère de regroupement familial existant. Les informations relatives au processus doivent être collectées dès la première étape d’enregistrement et regroupées sur une plateforme accessible pour tous les États membres de l’UE. Cette procédure doit être automatisée. Une fois l’identification et l’enregistrement accomplis, après avoir pris connaissance de la personne, de ses vulnérabilités, et lui avoir fourni une aide légale, la question « Est-ce que le demandeur d’asile a de la famille dans un des États membres ? » doit être posée. Si oui, celui-ci doit être directement transféré au sein de l’État membre où la famille est présente. Si non, la demande d’asile poursuit la procédure classique.

Une prise en charge soucieuse des mineur·e·s non accompagné·e·s par les États membres

L’UE doit défendre des standards de protection pour les mineur·e·s non accompagné·e·s garantissant dans chaque État membre : 

  • une identification et un enregistrement rapide ; 
  • une aide de sécurité ; 
  • le traçage des membres de la famille ; 
  • un apport d’une représentation légale ; 
  • un suivi psychologique.

Les pays membres de l’UE doivent en effet apporter une aide efficace et complémentaire avec notamment un soutien psychologique. Nous le savons, le traumatisme causé par la traversée produit des incohérences dans le récit qui défavorisent les jeunes dans l’évaluation de leur âge. Les États doivent apporter une formation rigoureuse et continue aux travailleurs sociaux pour que l’incertitude favorise non pas seulement en théorie, mais en pratique, le ou la jeune. Enfin, les pays membres doivent favoriser une coordination sans délai entre les administrations et associations afin de répondre efficacement aux différents besoins des mineur·e·s non accompagné·e·s.

Une réforme visant à fluidifier le système administratif d’asile

Un fonctionnement commun pour l’enregistrement

Les États membres doivent appliquer une uniformisation des critères et des taux d’obtention de l’asile. C’est une condition essentielle pour garantir la liberté de la personne réfugiée ou migrante de s’installer dans le pays de son choix.

Les États membres doivent enregistrer toutes les personnes qui arrivent dans l’UE dans un système d’enregistrement partagé. Cette mesure permettra des contrôles de sécurité plus efficaces à l’entrée et réduira la multiplication des systèmes d’asile variés et coûteux. Ce système pourra pallier les défauts d’information et d’enregistrement et les problèmes liés à des informations relevées par différents États membres et qui ne coïncident pas entre elles. 

Ce système doit être rattaché à chaque système de procédure d’asile national et avec le soutien d’agences européennes : 

  • l’enregistrement devra être automatique et non questionnable ;
  • l’identification des besoins spécifiques renvoyé aux instances compétentes ; 
  • des bases de données partageront les procédures les plus adaptées à chaque situation ; 
  • d’abord géré par les pays membres concernés, à long terme, ce système pourrait être ensuite progressivement délégué à une agence tierce à responsabilité européenne.

Des procédures simplifiées pour déterminer l’asile

L’UE doit proposer des procédures de détermination de l’asile efficaces et rationalisées afin de répondre aux arrivées diverses des réfugié·e·s et personnes migrantes. Il faut diviser en deux le traitement et que les demandes d’asile qui sont fortement fondées, et, à l’inverse, non fondées, soient toutes deux automatiquement dirigées vers une procédure accélérée et compétente. Ces procédures pourraient être menées par des agences européennes afin de relâcher la pression sur les États dont le système d’asile est le plus fragile. Cette procédure accélérée permettrait deux choses :

  • accorder rapidement une protection à ceux qui en ont besoin ;
  • faciliter le retour pour les personnes déboutées avec l’aide de l’agence Frontex.

Ce système accéléré fonctionnerait en parallèle du système classique en place et permettrait une prise de décision rapide et basée sur des informations solidement récoltées. 

Un mécanisme de répartition juste entre les États membres

Un partage de la responsabilité

L’UE doit favoriser un partage juste de la responsabilité pour répondre aux arrivées disproportionnées entre les pays membres. Il faut refonder une confiance entre les États et en l’UE. Pour cela :

  • un pourcentage d’arrivées jugé juste par pays doit être voté au niveau de l’UE ;
  • lorsqu’un pays reçoit plus de demandes d’asiles que ce seuil fixé au préalable, les demandes surpassant ce seuil pourraient être distribuées à d’autres États membres selon des critères de quotas et de regroupement familial ;
  • les demandes d’asile fondées sur des critères de regroupement familial et de refuge humanitaire, notamment, seront traitées via la procédure accélérée nouvellement instaurée depuis le pays d’arrivée. 

Ces conditions pourraient être inscrites dans les objectifs annuels fixés par l’UE aux États membres et leur respect inscrit comme condition nouvelle d’entrée dans l’UE. 

Un système de retour juste et efficace

Les différentes propositions énoncées assureront un système d’asile plus efficace qui permettra d’identifier plus rapidement les personnes qui ne sont pas éligibles à une protection internationale. La fluidité du système pourrait ainsi augmenter la confiance des États membres dans le nouveau système et favoriser les procédures d’aides au retour volontaire. Les retours forcés ne doivent être appliqués qu’en cas d’un rejet dans une procédure d’asile juste et exclusivement après examen d’une procédure d’aide au retour volontaire. Les programmes de retour requièrent également une forte coopération entre l’UE et les pays d’origine ainsi qu’un soutien pour la réintégration dans le pays d’origine. 

Pour une intégration complète et durable dans la communauté

Un renforcement des fonds pour les programmes d’intégration

L’intégration suppose un processus à deux sens entre les réfugiés et leur communauté d’accueil et un nouveau contrat social doit être établi afin d’accroître la confiance politique et sociale dans le système nouveau. Les États membres doivent assurer, en pratique, la protection des droits fondamentaux et un environnement propre à l’épanouissement. 

Investir dans l’intégration doit être obligatoire et tous les États membres devraient allouer au moins 30% de leur budget annuel consacré au système européen d’asile, de migration et d’intégration (AMIF). Ce budget serait distribué à la fois à des autorités locales et ONG et à des acteurs non traditionnels comme les universités et associations. 

Redonner la parole

Renforcer le système d’asile européen, c’est aussi l’histoire d’une lutte contre la xénophobie, une lutte pour l’intégration et l’acceptation de l’autre. Ces problèmes sont souvent la marque d’un manque de sensibilisation aux enjeux de la migration, aux réalités historiques et contemporaines des départs forcés. C’est pourquoi tous les États membres devraient intégrer dans leur cursus scolaire, et le plus tôt possible au sein de ce cursus, un programme d’éducation aux enjeux de la migration. 

L’évolution de la couverture médiatique participe de cette méconnaissance. Cette dernière s’est progressivement traduite par une confiscation de la parole des premiers concernés, les réfugiés.

Les États membres doivent donc promouvoir un discours nouveau sur la migration, au travers de forums, de formations en entreprises, en encourageant et finançant le travail d’associations solidaires et, surtout, en assurant aux personnes réfugiées et migrantes de pouvoir accéder aux mêmes postes que n’importe quel autre citoyen. En somme, l’UE doit redonner la parole aux premiers concernés.

Cette note, à travers ses propositions, soutient toutes les initiatives permettant d’améliorer le système d’asile européen, l’accueil et l’intégration durables des personnes réfugiées et migrantes, la défense des droits fondamentaux et le respect des principes de solidarité.

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